En dépit des préoccupations légitimes de la CNIL - le gendarme français de la vie privée déplorant le caractère très intrusif dans la vie privée des internautes de ce projet -, la commission des finances de l’Assemblée Nationale a adopté ce mercredi l’article 57 du projet de loi des finances (PLF) 2020 qui permet à Bercy de surveiller les réseaux sociaux et de collecter ;en masse les informations publiques postées par les internautes pour détecter d’éventuelles fraudes à l’impôt par voie logicielle.
Pour rappel, le gouvernement déplore depuis de nombreuses années le fait que, grâce à Internet, « ;il est aisé de réaliser, de manière occulte ou sans respecter ses obligations fiscales ou douanières, une activité économique sur la toile ;», notamment de commerce des marchandises prohibées. L’une des options envisagées pour limiter ce problème passe par une surveillance plus étroite des plateformes du Web et des réseaux sociaux en particulier afin de déterminer si le train de vie affiché en ligne de tel ou tel internaute coïncide avec sa situation fiscale. Mais jusqu’à présent, il était illégal pour l’État d’exploiter les données tirées des réseaux sociaux pour détecter automatiquement les fraudeurs. Il n’avait ni l’autorisation des internautes ni celle des entreprises d’Internet pour agir de la sorte. D’où la nécessité d’introduire une pareille modification législative, selon Bercy.
L’administration Macron a fait de ce concept qui met en avant l’intelligence artificielle (IA) l’un des objectifs majeurs du PLF 2020, précisant que ce dispositif de surveillance excluant la technologie de reconnaissance faciale n’est envisagé qu’à titre expérimental pour une durée de trois ans, mais qu’il pourra être reconduit s’il fait ses preuves. L’administration fiscale ne devra cependant employer le nouveau système que pour « ;rechercher les manquements les plus graves ;» en n’exploitant que les données « ;strictement nécessaires ;» et éviter de recourir à une entreprise sous-traitante pour aspirer les données des internautes. Par ailleurs, le gouvernement a assuré que les informations ne donnant pas lieu à une analyse plus poussée de la part de l’administration fiscale seront rapidement supprimées du système.
Les autres dispositions réglementaires qui contribueront à l’atteinte de cet objectif devraient être introduites au même moment. Elles incluent notamment l’obligation pour les plateformes d’économie collaborative de communiquer à l’administration fiscale les revenus de leurs utilisateurs et l’adoption de mesures visant à faciliter et les échanges de données et la collaboration entre administrations.
Le rapporteur des finances Joël Giraud a rappelé que dans le cadre de la nouvelle réglementation les contrôleurs des impôts effectuaient déjà des recherches de ce type, mais l’emploi de robots logiciels devrait changer la donne et aboutir à une surveillance massive des citoyens, en toute discrétion.
Une décision qui ne fait pas l’unanimité
Certains experts en droit estiment néanmoins que le texte contreviendrait au droit européen et pourrait même ne pas franchir la barrière du Conseil Constitutionnel. Dans la même mouvance, des députés ont avancé que « ;cet article est liberticide, sauf si on l’encadre pour le rendre convenable et respectueux des libertés publiques ».
Même si, la CNIL a reconnu le caractère louable et l’utilité de l’initiative législative dans son rapport rendu public le 30 septembre dernier, l’agence est montée aux créneaux pour dénoncer un projet susceptible d’instituer une « ;collecte générale préalable de données ;» au détriment de la surveillance ciblée en cas de « ;doute ;» ou de « ;suspicions ;» qui avait cours auparavant. La CNIL demandait plus de garanties aux législateurs et ainsi que de garde-fous qui pourront concourir à protéger efficacement la vie privée des Français et à lutter contre la fraude.
Source : AFP
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Le , par Christian Olivier
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