Après cinq années de procédures, Google sort allégé d’un procès antitrust historique aux États-Unis. Sundar Pichai, son PDG, a remercié Donald Trump lors d’un dîner à la Maison-Blanche, marquant une trêve fragile entre la Silicon Valley et Washington : « Je suis content que ça soit terminé ». En s’adressant directement à Donald Trump, dont l’administration a piloté les négociations de sortie, Pichai a exprimé un soulagement palpable, mais aussi une reconnaissance politique qui souligne à quel point les relations entre géants technologiques et pouvoir exécutif américain restent stratégiques. Mais derrière le soulagement affiché, d’autres batailles judiciaires et géopolitiques se profilent.Un procès au long cours contre le « monopole Google »
L’affaire trouve ses racines en 2020, lorsque le département de la Justice avait attaqué Google pour abus de position dominante sur le marché de la recherche. L’accusation centrale reposait sur des accords par défaut passés avec Apple, Mozilla et d’autres acteurs, qui verrouillaient l’accès des concurrents à des parts de marché substantielles. Le gouvernement américain accusait la firme de Mountain View de maintenir artificiellement son hégémonie en empêchant l’émergence d’alternatives viables.
Après cinq années de débats, de témoignages et de confrontations techniques, le jugement rendu cette semaine a reconnu le caractère monopolistique de Google, mais a écarté les mesures les plus radicales. Contrairement à ce que réclamaient certains régulateurs, la société ne sera pas forcée de se séparer de Chrome ou d’Android, piliers de son écosystème. Le juge Amit Mehta a privilégié des remèdes dits « comportementaux », comme l’interdiction des accords exclusifs et l’obligation de donner un accès plus large aux données de recherche pour ses concurrents.
Un compromis qui reflète la prudence des régulateurs
Cette décision a été décrite par de nombreux observateurs comme une victoire en demi-teinte. Google conserve l’intégralité de son architecture industrielle et évite une restructuration qui aurait pu affaiblir durablement son modèle économique. Pour les défenseurs de la concurrence, ce jugement reste insuffisant : les ajustements imposés ne changent pas fondamentalement la position de domination de Google sur la recherche en ligne.
Du côté des investisseurs, le verdict a été accueilli avec enthousiasme. Alphabet a ajouté cette semaine 230 milliards de dollars à sa capitalisation boursière après avoir évité une scission dans le cadre d'une affaire antitrust historique intentée par le ministère américain de la Justice en 2020. Google a été reconnu coupable l'année dernière de détenir un monopole illégal sur son marché principal, celui de la recherche sur Internet. En statuant cette semaine sur les sanctions, le juge fédéral américain Amit Mehta s'est prononcé contre les conséquences les plus sévères proposées par le ministère de la Justice.
C'est ce qui a fait bondir les actions de la société de recherche, reflétant un sentiment de stabilité retrouvée dans un contexte où la régulation de l’IA et du numérique est de plus en plus imprévisible. Pour l’administration Trump, cette conclusion est présentée comme un succès : limiter l’ingérence étatique tout en montrant que le gouvernement reste attentif aux abus potentiels des géants technologiques.
La scène politique et le dîner à la Maison-Blanche : « J'apprécie que votre administration ait mené un dialogue constructif »
Le dîner à la Maison-Blanche, auquel participaient Sundar Pichai, Tim Cook, Satya Nadella, Mark Zuckerberg et Sam Altman, a offert une mise en scène claire. L’administration voulait afficher son rôle d’arbitre pragmatique, mais aussi de catalyseur de l’innovation américaine. C'est à l'occasion de ce dîner avec des dirigeants du secteur technologique que le président Donald Trump a félicité le PDG de Google, Sundar Pichai, et le cofondateur Sergey Brin après la décision favorable rendue mardi par l'Alphabet dans le cadre d'une affaire antitrust.
« Vous avez passé une très bonne journée hier », a déclaré Trump en s'adressant à Pichai lors du dîner de jeudi soir. « Google a passé une très bonne journée hier. Voulez-vous nous parler de cette grande journée que vous avez passée hier ? »
« Je suis content que ce soit terminé », a répondu Pichai à Trump, provoquant un éclat de rire chez les autres convives. « C'est un long processus », a déclaré Pichai. « J'apprécie que votre administration ait mené un dialogue constructif et que nous ayons pu parvenir à une certaine résolution. »
« C'est vrai », a répondu Trump.
« L'intelligence artificielle est l'une des transformations les plus importantes que nous ayons jamais connues ou que nous connaîtrons au cours de notre vie. Il est donc important de s'assurer que les États-Unis soient à l'avant-garde dans ce domaine, et je pense que votre administration investit beaucoup dans ce domaine », a déclaré Pichai. « Je pense que le plan d'action en matière d'intelligence artificielle mis en place sous votre direction est déjà un excellent début, et nous sommes impatients de travailler ensemble. Merci pour votre leadership. »
Le plan auquel Pichai fait référence est celui de l'administration intitulé « Winning the AI Race: America's AI Action Plan » (Gagner la course à l'IA : le plan d'action américain en matière d'IA), lancé en juillet, qui prétend identifier 90 mesures politiques fédérales s'articulant autour de trois piliers : l'accélération de l'innovation, la mise en place d'une infrastructure d'intelligence artificielle et le leadership en matière de diplomatie et de sécurité internationales. Une partie de ce plan comprend un décret présidentiel de juillet qui stipule que les modèles d'IA ne doivent pas intégrer « l'IA woke » ou « des dogmes idéologiques tels que la DEI », c'est-à-dire la diversité, l'équité et l'inclusion.
Google est également en pourparlers avec les avocats de Trump dans le cadre d'un procès en cours que le président a intenté il y a plus de quatre ans, accusant la plateforme vidéo en ligne YouTube de censure illégale. Le procès fait suite à la suspension des comptes de Trump sur les réseaux sociaux après l'émeute du Capitole américain le 6 janvier.
Une victoire partielle, mais des menaces toujours présentes
Si Sundar Pichai peut savourer ce répit, la bataille est loin d’être terminée. Google fait face à un autre procès antitrust, cette fois-ci sur ses pratiques en matière de publicité numérique, dont l’audience sur les remèdes doit débuter le 22 septembre. Ce dossier est tout aussi sensible : la publicité représente encore l’essentiel des revenus du groupe, et une décision défavorable pourrait remodeler le marché de l’adtech.
À l’international, la pression est encore plus forte. L’Union européenne vient d’infliger à Google une amende record de 2,95 milliards d’euros pour ses pratiques anticoncurrentielles dans la publicité en ligne. Une sanction qui a provoqué l’ire de Donald Trump, menaçant Bruxelles de représailles tarifaires. Pour le président américain, ces amendes sont perçues comme une attaque économique déguisée contre les champions technologiques des États-Unis.
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