
L'émulation est légale, mais les développeurs sont sur la corde raide
L'année dernière a été difficile pour les projets d'émulation. Nintendo a fait pression sur plusieurs projets d'émulation comme Yuzu, Citra et Ryujinx et a réussi à les fermer. Toutefois, aucune de ces affaires n'a été portée devant les tribunaux, de sorte que le statut juridique de l'émulation n'a pas encore été testé. Aujourd'hui, nous savons peut-être pourquoi ces affaires ont été réglées à l'amiable : l'émulation est légale, mais les développeurs sont sur la corde raide.
Lors de la Tokyo eSports Festa qui s'est tenue en début de semaine, les principaux avocats et responsables de la propriété intellectuelle de Capcom, Koei, Sega, Konami et Nintendo ont débattu de diverses questions relatives au droit d'auteur et à la propriété intellectuelle dans l'industrie du jeu vidéo. Lors du débat, il est apparu que « les émulateurs de jeu sont légaux », mais que les développeurs peuvent facilement enfreindre la loi s'ils ne savent pas ce qu'ils font.
Koji Nishiura, avocat spécialisé dans les brevets et directeur général adjoint du département de la propriété intellectuelle de Nintendo, a reconnu que les émulateurs sont, techniquement, tout à fait légaux. Mais il a ajouté qu'il existe un certain nombre de façons dont les émulateurs peuvent violer la loi :

Cette discussion était basée sur la loi japonaise, mais la même formulation se trouve dans la section 1201(a)(1)(A) de la loi américaine DMCA (Digital Millennium Copyright Act) : « personne ne doit contourner une mesure technologique qui contrôle efficacement l'accès à une œuvre protégée en vertu de ce titre ».
La législation américaine date de plus de 26 ans, mais son libellé est toujours en vigueur. En somme, les lois sur les brevets et les droits d'auteur varient en fonction du pays ou de l'état dans lequel vous vous trouvez, alors si vous n'êtes pas sûr, consultez un avocat local ou optez pour la prudence.
Quelques cas dans lesquels l'émulation d'un système peut être illégale
Au début de l'année 2024, Nintendo a poursuivi les fabricants de Yuzu, un émulateur populaire de la Nintendo Switch, alléguant que « le projet contourne illégalement les mesures technologiques qui aident à dissuader le piratage des jeux Switch ». Quelques semaines plus tard, les développeurs de Yuzu ont accepté de mettre fin au développement du projet et de verser environ 2,4 millions de dollars au géant japonais.
Quelques mois après la fermeture de l'émulateur Yuzu, son concurrent Ryujinx a également cessé son développement et a été mis hors ligne après que son créateur a été contacté par Nintendo. Les utilisateurs ont commencé à signaler un message 404 lorsqu'ils essayaient d'accéder à la page Github de Ryujinx tôt dans la journée du 1er octobre 2024, et l'inquiétude s'est accrue lorsque la page de téléchargement de l'émulateur est devenue inaccessible.
Koji Nishiura a déclaré que Nintendo a fermé plusieurs émulateurs dans le monde entier pour avoir contourné les mesures de restriction technologique, expliquant qu'il s'agissait d'un moyen de protéger les développeurs. Une déclaration qui est toutefois controversée. La société a fait quelque chose de similaire en 2009, lorsqu'elle s'est associée à 54 développeurs pour fermer une entreprise qui fabriquait un appareil permettant de jouer à des jeux DS piratés.
Lors des débats, l'on entend souvent dire qu'il est parfaitement légal d'émuler un jeu que l'on possède déjà si l'on en a acheté une copie légitime, mais Koji Nishiura explique qu'un émulateur peut enfreindre la loi de bien des façons. Voici quelques cas qui exposent les développeurs à des problèmes d'ordre juridique :
- si un émulateur copie une partie du système qu'il imite, il peut s'agir d'une violation des droits d'auteur et donc d'une infraction à la loi ;
- si l'émulateur désactive certaines des fonctions de sécurité intégrées au jeu, cela peut également être illégal ;
- si un émulateur renvoie à des sites où vous pouvez télécharger des jeux piratés, il peut également être illégal et est connu sous le nom de « reach app » ou « reach site » dans la loi japonaise ;
- les éléments spécifiques tels que l'écran d'accueil ou les menus sont protégés par des droits d'auteur. La copie de ces éléments dans un émulateur ouvre une boîte de Pandore juridique distincte, mais tout aussi sinueuse.
Ainsi, même si vous possédez une copie d'un jeu sur une ancienne console et que vous souhaitez simplement y jouer sur votre ordinateur, votre émulateur peut vous causer des problèmes d'ordre juridique. Les différents cas ci-dessus ne laissent pas beaucoup de marche de manœuvre aux développeurs.
En ce qui concerne la sécurité, Nintendo vous demande de ne pas utiliser de « services non autorisés » pour jouer aux jeux de la console Wii U. Le géant japonais du jeu vidéo a fermé les serveurs en ligne de la console l'année dernière parce qu'ils représentaient un « risque pour la sécurité ».
Nintendo s'attaque aux créateurs de contenu promouvant les émulateurs
Il semble également que Nintendo soit de retour sur le terrain juridique en général. Outre les émulateurs, la société semble également s'attaquer aux chaînes YouTube qui montrent ses jeux en train d'être émulés, semant la panique dans le rang des créateurs de contenu. Nintendo a prononcé une sanction pour violation du droit d'auteur à l'encontre d'une chaîne YouTube qui passe en revue des ordinateurs de poche d'émulation, le forçant à renoncer à continuer.
[...I hate making posts like this, but I received another copyright strike this morning. I'm going to have to change the way I make videos. More info: https://t.co/ihGy4OLNzx pic.twitter.com/xRHx0PN2pn
— Retro Game Corps (@RetroGameCorps) September 28, 2024
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