Les prises de position de Musk sur sa plateforme X, notamment en faveur de partis d'extrême droite comme l'Alternative für Deutschland en Allemagne, et ses critiques envers des dirigeants politiques tels que le Premier ministre britannique Keir Starmer, ont été perçues comme une menace pour la souveraineté politique européenne. Le président Emmanuel Macron a accusé Musk de soutenir un mouvement « réactionnaire international », soulignant l'importance de protéger l'espace public européen contre de telles influences.
Sur son réseau X, Musk s'en est pris récemment à de nombreux dirigeants européens, tel le social-démocrate Olaf Scholz, aux prises à des législatives partielles délicates, ainsi qu'au travailliste britannique Keir Starmer. Il a même soutenu le parti d'extrême droite allemand, l'AfD.
« Lorsque l'on participe à un gouvernement ou lorsqu'on aspire à y participer, ses opinions ont une valeur un peu particulière », a noté Jean-Noël Barrot. « Soit Elon Musk lorsqu'il intervient dans le débat public dans certains débats électoraux européens, le fait pour faire le buzz et alors c'est extrêmement regrettable, soit il le fait en assumant des alliances nouvelles avec des partis d'ultra-droite comme l'AfD en Allemagne et alors il faudrait que le Parti républicain américain assume de lier son destin avec celui de tel parti qui représente tout ce que le Parti républicain a toujours combattu », a-t-il expliqué.
De son côté, le président français Emmanuel Macron a déclaré : « Il y a dix ans, qui aurait imaginé que le propriétaire de l'un des plus grands réseaux sociaux du monde soutiendrait un nouveau mouvement réactionnaire international et interviendrait directement dans des élections, y compris en Allemagne. Qui l'aurait imaginé ? C'est le monde dans lequel nous vivons et dans lequel nous allons devoir faire de la diplomatie ».
Il est possible de suspendre X en Europe, comme cela a été le cas au Brésil
Le 30 août 2024, la Cour suprême du Brésil a ordonné la suspension immédiate de la plateforme de médias sociaux X, anciennement connue sous le nom de Twitter, dirigée par Elon Musk.
La suspension de X au Brésil découle de la non-conformité de la société aux ordres judiciaires. Le juge de Moraes avait donné à Musk un délai de 24 heures pour nommer un représentant légal au Brésil, une exigence légale pour les entreprises de médias sociaux opérant dans le pays. Cette mesure vise à garantir que les entreprises respectent les demandes de retrait de contenu, notamment celles liées à la désinformation politique et aux incitations à la violence. La société n'a plus de représentant dans le pays depuis le début de ce mois-là.
« Elon Musk a montré son manque total de respect pour la souveraineté brésilienne et, en particulier, pour le pouvoir judiciaire, s'érigeant en véritable entité supranationale et immunisée contre les lois de chaque pays », a écrit de Moraes dans sa décision.
Interrogé sur le fait de savoir si « le bannissement » de X pouvait intervenir en Europe, comme au Brésil où le réseau a été suspendu 40 jours, Jean-Noël Barrot a répondu: « c'est prévu dans nos lois ».
En effet, en cas de non-respect du DSA, des astreintes et des sanctions peuvent être prononcées. Pour les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche, la Commission peut infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires mondial. En cas de violations graves et répétées au règlement, les plateformes peuvent se voir interdire leurs activités sur le marché européen.
« Soit la Commission européenne applique avec la plus grande fermeté les lois que nous nous sommes données pour protéger notre espace public, soit elle ne le fait pas et alors il faudra qu’elle consente à rendre aux États membres de l’UE, à rendre à la France, la capacité de le faire », a déclaré Jean-Noël Barrot sur la radio France Inter. « Il faut nous réveiller », a-t-il martelé.
La France pourrait geler les milliards d'actifs financiers d'Elon Musk s'il est prouvé qu'il a enfreint la loi
Les choses pourraient ne pas s'arranger pour Musk après que la France a récemment adopté de nouvelles lois visant à réprimer l'ingérence étrangère dans les élections. Il est possible que la France gèle les milliards d'actifs financiers d'Elon Musk s'il est prouvé qu'il a enfreint la loi.
En effet, la loi prévoit la possibilité de geler les avoirs financiers de toute personne (qu'il s'agisse d'une personne, d'une entreprise ou d'une entité) qui serait impliquée dans ce type d'ingérence :
Envoyé par Texte de loi
Quoiqu'il en soit, le patron de Tesla a depuis répondu aux accusations de Macron en s'en prenant à un autre homme politique européen, le premier ministre britannique Keir Starmer.
Dans une publication sur X, Musk a écrit : « Oh comme la fois où Starmer a traité @realDonaldTrump de raciste et a dit que le gouvernement britannique devrait tout faire pour l'arrêter ? Ou lorsque Starmer a envoyé des membres du parti travailliste britannique faire campagne aux États-Unis contre le président Trump cette année ? »
Dans une publication précédente, Musk a également affirmé : « Starmer est diabolique ».Oh like that time Starmer called @realDonaldTrump a racist and said the British government should do everything to stop him?
— Elon Musk (@elonmusk) January 6, 2025
Or when Starmer sent British Labour Party members to campaign in the US against President Trump this year?https://t.co/5R28WgZIj0 https://t.co/S3cjV27Woi
Le milliardaire s'est beaucoup exprimé en ligne sur ce qu'il pense de la politique européenne ces derniers temps.
Parmi ses autres publications sur X, on trouve notamment : « Starmer doit partir. Il est une honte nationale » et « Le parti réformiste a besoin d'un nouveau leader. Farage n'a pas ce qu'il faut ».
Musk a également partagé un tweet d'un utilisateur qui affirmait que les arrestations au Royaume-Uni pour des publications sur les médias sociaux avaient « grimpé en flèche » en 2024, ajoutant : « En 2024, le Royaume-Uni a arrêté plus de 100 personnes pour des publications sur les médias sociaux, avec des accusations allant d'un contenu "grossièrement offensant" à l'incitation à la protestation. Les critiques parlent d'une attaque en règle contre la liberté d'expression ».
En réponse, Musk a écrit : « À ce rythme, le gouvernement britannique exécutera bientôt des personnes pour avoir aimé un mème ! »
DSA : les certifications de comptes payantes sur X sont trompeuses, estime l'UEAt this rate, the UK Government will pretty soon be executing people for liking a meme! https://t.co/j1PX1qG7WW
— Elon Musk (@elonmusk) January 4, 2025
Depuis le 1er avril 2023, Elon Musk a mis fin au programme de vérification héritée (la pastille bleue qui était précédemment accordée aux comptes en fonction de l'identité, de la notoriété et d'autres critères), l'objectif étant de pousser les utilisateurs à passer à l'offre payante Twitter Blue. Ceux qui ont obtenu leur badge bleu avant qu'Elon Musk ne devienne le PDG de l'entreprise doivent eux aussi payer pour conserver le badge.
En réalité, cette décision n'est pas vraiment une surprise : avant même d'être PDG de Twitter, Elon Musk s’était montré hostile contre le système d’attribution des badges. Il avait par exemple expliqué en décembre que l’obtention de ces certifications gratuites avait été faite de façon « corrompue ».
Le 18 décembre 2023, la Commission a ouvert une procédure formelle pour déterminer si X pourrait avoir enfreint la loi sur les services numériques dans des domaines liés à la diffusion de contenus illicites et à l'efficacité des mesures prises pour lutter contre la manipulation de l'information, pour lesquels l'enquête se poursuit, ainsi qu'aux schémas sombres, à la transparence de la publicité et à l'accès aux données pour les chercheurs.
En octobre 2024, l’Union européenne a porté des accusations contre X, anciennement connu sous le nom de Twitter, concernant ses coches bleues. Ces marques de vérification, qui étaient autrefois réservées aux célébrités et aux personnalités influentes, sont désormais accessibles à tous moyennant un abonnement mensuel de 8 $. Cependant, selon la Commission européenne, cette pratique constitue un « dark pattern » et ne respecte pas les meilleures pratiques de l’industrie.
Dans son communiqué de presse, l'UE indique que les modifications apportées au système de vérification bleue de X, qui permet à tout utilisateur de payer pour être « vérifié », empêchent les utilisateurs de déterminer l'authenticité des autres comptes avec lesquels ils interagissent. Il existe également des preuves que des acteurs malveillants abusent du système pour tromper intentionnellement les utilisateurs, selon les conclusions de l'UE.
X a déjà été mis en garde à plusieurs reprises en Europe concernant la propagation de désinformation
En octobre 2023, des fonctionnaires européens ont averti X que la société semblait avoir hébergé des informations erronées et des contenus illégaux sur la guerre entre le Hamas et Israël, en violation potentielle de la loi sur la modération des contenus signée par l'Union européenne.
« Nous disposons, de sources qualifiées, de rapports sur des contenus potentiellement illégaux circulant sur votre service malgré les drapeaux des autorités compétentes », a écrit Thierry Breton. « Je vous rappelle qu'à la suite de l'ouverture d'une enquête potentielle et d'un constat de non-conformité, des sanctions peuvent être imposées », a-t-il ajouté.
Dans un échange sur X, Musk a répondu à Breton : « Notre politique est que tout soit open source et transparent, une approche que je sais que l'UE soutient ». « Veuillez énumérer les violations auxquelles vous faites allusion sur X, afin que le public puisse les voir », a-t-il continué.
Breton a répondu : « Vous êtes bien conscient des rapports de vos utilisateurs - et des autorités - sur les faux contenus et l'apologie de la violence. C'est à vous de montrer que vous passez de la parole aux actes. Mon équipe reste à votre disposition pour veiller au respect du DSA, que l'UE continuera à faire respecter rigoureusement ».
En août 2024, le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton a rappelé à Elon Musk la nécessité pour X de se conformer aux lois de l'UE restreignant les contenus préjudiciables sur les plateformes en ligne avant son interview avec l'ancien président Donald Trump. Sur X, il a indiqué « qu'une grande audience implique une plus grande responsabilité » et a ajouté « Comme il existe un risque d'amplification de contenus potentiellement préjudiciables dans [l'UE] en relation avec des événements ayant une grande audience dans le monde entier, j'ai envoyé cette lettre à @elonmusk ».
En réponse, Musk a utilisé un mème issu du film “Tropic Thunder” pour exprimer son mécontentement.
Source : LOI du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en FranceTo be honest, I really wanted to respond with this Tropic Thunder meme, but I would NEVER do something so rude & irresponsible! https://t.co/jL0GDW5QUx pic.twitter.com/XhUxCSGFNP
— Elon Musk (@elonmusk) August 12, 2024
Et vous ?
Quelle est la frontière entre la liberté d'expression d'un individu influent comme Elon Musk et une ingérence politique inacceptable ?
Peut-on qualifier les prises de position sur une plateforme privée comme X d’atteinte à la souveraineté politique ?
Les utilisateurs d'une plateforme ont-ils le droit d'influencer le débat public, même lorsqu'ils ne sont pas citoyens des pays concernés ?
Les actions de Musk ont-elles réellement un impact mesurable sur les opinions publiques, ou amplifie-t-on leur importance ?