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Les autorités américaines de régulation cherchent à démanteler Google en forçant la vente de Chrome
Pour empêcher l'entreprise de continuer à écraser la concurrence avec son moteur de recherche dominant

Le , par Mathis Lucas

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Le ministère américain de la Justice a déposé auprès du tribunal un document de 23 pages déposé dans lequel il appelle à des sanctions radicales contre le monopole de Google. Il invite notamment le tribunal à contraindre Google à céder la division qui développe son navigateur Web Chrome. Cette demande intervient après qu'un juge a statué que « Google a maintenu un monopole abusif » au cours de la dernière décennie en écrasant la concurrence avec son moteur de recherche dominant et son système d'exploitation mobile Android. Google dénonce cette mesure et affirme que la vente forcée de Chrome nuirait aux consommateurs et aux entreprises.

Le monopole de Google sur la recherche menacé par la vente forcée de Chrome

Google est dans la tourmente depuis quelques années. L'entreprise risque plus que jamais un démantèlement qui pourrait briser le lien solide entre son moteur de recherche, son navigateur Web Chrome et son système d'exploitation mobile Android. Cette triade représente un empire de plusieurs centaines de milliards de dollars par an qui permet à Google d'asseoir sa domination sur le marché mondial de la recherche en ligne et de contrôler l'écosystème Android.


Alors que Google voudrait surtout continuer à renforcer cet empire, le ministère américain de la Justice (DOJ) veut casser l'interconnexion entre ses plateformes, puis forcer la vente de Chrome. Le DOJ a fait part de sa vision dans un dossier de 23 pages déposé ce 20 novembre 2024 auprès d'un tribunal. Il se dit convaincu que la cession de Chrome briserait le monopole de sur le marché mondial de la recherche et favoriserait une concurrence plus saine.

La demande du DOJ après qu'un juge du tribunal fédéral du District de Columbia a statué, en août 2024, que Google constitue un monopole et que le géant de la recherche en ligne a enfreint la loi en concluant des accords de plusieurs milliards de dollars pour faire de son moteur de recherche l'option par défaut dans les navigateurs Web et sur les smartphones, y compris les appareils d'Apple et de Samsung. La décision a été rendue par le juge Amit Priyavadan Mehta.

Selon Amit Mehta, « les paiements effectués par Google à d'autres entreprises pour être le moteur de recherche par défaut empêchaient effectivement tout autre concurrent de s'imposer sur le marché ». Citant la décision du juge Amit Mehta, le DOJ a écrit dans son dossier : « Google doit se défaire de Chrome, qui a renforcé sa domination, afin que ses concurrents puissent conclure des partenariats de distribution que cette réalité de contrôle empêche aujourd'hui ».

Le document poursuit : « les règles du jeu ne sont pas équitables en raison du comportement de Google, et la qualité de Google reflète les gains mal acquis d'un avantage illégalement acquis. La mesure corrective doit combler cet écart et priver Google de ces avantages ». Si le juge Amit Mehta suit les recommandations du gouvernement américain, Google sera contraint de vendre son navigateur Chrome, vieux de 16 ans, dans les six mois suivant la décision finale.

Google estime que le DOJ menace le leadership technologique mondial des USA

Google n'entend pas laisser filer son navigateur Chrome qui constitue un élément critique de son empire. Si Google perd cette bataille, les retombées pourraient être dévastatrices pour le géant de Mountain View. L'entreprise fera certainement appel de toute sanction, ce qui pourrait prolonger un bras de fer juridique qui dure depuis plus de quatre ans. En outre, l'on ignore si la prochaine administration Trump sera tout aussi déterminée à aller jusqu'au bout.


En attendant, Google affirme que « la proposition stupéfiante du gouvernement nuirait aux consommateurs et au leadership technologique mondial de l'Amérique ». « Le ministère de la Justice a choisi de promouvoir un programme interventionniste radical qui nuirait aux Américains et au leadership technologique mondial des États-Unis », a déclaré Kent Walker, président des affaires mondiales et directeur juridique de Google et d'Alphabet, dans un billet de blogue.

Il a ajouté : « la proposition extrêmement vaste du ministère de la Justice va bien au-delà de la décision de la Cour. Elle porterait atteinte à toute une série de produits Google - même au-delà de la recherche - que les gens aiment et trouvent utiles dans leur vie de tous les jours ». Selon Kent Walker, la proposition du DOJ menace non seulement les capacités d'innovation de Google, mais aussi la confidentialité des requêtes de recherche personnelles des Américains.

Il a déclaré : « la proposition exigerait la divulgation à des sociétés étrangères et nationales inconnues non seulement des innovations et des résultats de Google, mais aussi, ce qui est encore plus inquiétant, des requêtes de recherche personnelles des Américains ». Il a également affirmé que cela freinerait les investissements américains dans l'IA, qui est peut-être l'innovation la plus importante de notre époque, dans laquelle Google joue un rôle de premier plan.

Alors que Google intègre plus profondément l'IA dans son moteur de recherche, le DOJ se méfie et conseille également au juge Amit Mehta de veiller à ce que les sites Web soient en mesure de protéger leur contenu des techniques utilisées par Google dans le cadre de la formation de ses modèles d'IA. Selon les analystes, ces mesures, si elles sont ordonnées, menacent de bouleverser une activité qui devrait générer plus de 300 milliards de dollars de revenus cette année.

L'administration Trump : la chance de Google d'échapper au démantèlement ?

Selon certains analystes, il est encore possible que le DOJ atténue ses tentatives visant à démanteler Google, en particulier si le président Donald Trump prend la décision, largement attendue, de remplacer le procureur général adjoint Jonathan Kanter, nommé par Joe Biden pour superviser la division antitrust du DOJ. Les analystes s'attendent en effet à « une dérèglementation massive » dans le secteur technologique sous la prochaine administration Trump.

Bien que l'affaire visant Google ait été déposée au cours des derniers mois du premier mandat de Donald Trump, Jonathan Kanter a supervisé le procès très médiatisé qui a abouti à la décision du juge Amit Mehta en défaveur de Google. Travaillant en tandem avec Lina Khan, la présidente de la Federal Trade Commission (FTC), Jonathan Kanter a adopté une position intransigeante à l'égard des Big Tech, plongeant dans la tourmente Apple, Google, et bien d'autres.

Donald Trump craint qu'un démantèlement détruise Google, mais il n'a pas précisé les autres sanctions qu'il pourrait avoir à l'esprit. « Ce que l'on peut faire sans le démanteler, c'est s'assurer qu'il est plus équitable », a-t-il déclaré récemment. Mais notons que Matt Gaetz, l'ancien membre républicain du Congrès désigné par Donald Trump pour devenir le prochain procureur général des États-Unis, a déjà appelé par le passé au démantèlement des Big Tech.

Le DOJ souhaite non seulement que Chrome soit vendu et qu'Android soit mis sous contrôle, mais aussi que le juge interdise à Google de conclure des accords de plusieurs milliards de dollars pour faire de son moteur de recherche dominant l'option par défaut de l'iPhone d'Apple et d'autres appareils. Le juge interdirait également à Google de favoriser ses propres produits et services, tels que YouTube ou Gemini, sa plateforme d'IA lancée l'année dernière.

Analyse critique des propositions du ministère américain de la Justice

Les régulateurs américains souhaitent également que Google concède à ses rivaux une licence sur les données de l'index de recherche qu'il recueille à partir des requêtes des internautes, afin de leur donner une meilleure chance de rivaliser avec le géant de Mountain View. Une proposition controversée dénoncée par Google, qui a déclaré que cela nuirait à ses activités. Une autre proposition du DOJ concerne l'aspect commercial de son moteur de recherche.

Google serait tenu de faire preuve de plus de transparence dans la manière dont il fixe les prix que les annonceurs paient pour figurer en tête de certains résultats de recherche ciblés. Mais les propositions de Jonathan Kanter soulèvent déjà des questions quant à savoir si les régulateurs cherchent à imposer des contrôles qui vont bien au-delà des questions couvertes par le procès de l'année dernière et, par extension, par la décision du juge Amit Mehta.

Selon certains analystes, il n'est pas certain que le juge Amit Mehta accepte l'argument du DOJ selon lequel Chrome doit être séparé de Google ou qu'Android doit être complètement séparé de son moteur de recherche. À ce propos, Shubha Ghosh, professeur de droit à l'université de Syracuse, affirme : « cela va probablement un peu plus loin. Les mesures correctives devraient correspondre au préjudice, à la transgression. Cela semble aller un peu au-delà ».

Le juge Mehta se prononcera sur le recours dans cette affaire à l'issue d'un procès de deux semaines prévu pour le mois d'avril 2025. DuckDuckGo, le rival de Google dont les dirigeants ont témoigné lors du procès de l'année dernière, a affirmé que le DOJ faisait simplement ce qu'il fallait pour contenir un monopole effronté. DuckDuckGo et d'autres acteurs du marché de la recherche dénoncent depuis de nombreuses années les pratiques de Google.

« Pour mettre fin aux agissements illégaux de Google, qui se chevauchent et se généralisent depuis plus d'une décennie, il faut plus que des restrictions contractuelles : il faut toute une série de mesures correctives pour créer une concurrence durable », affirme Kamyl Bazbaz, vice-président senior des affaires publiques de DuckDuckGo.

Source : les propositions du ministère américain de la Justice (PDF)

Et vous ?

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Que pensez-vous des propositions du DOJ pour briser le monopole de Google ?
Selon vous, les mesures proposées par le DOJ vont-ils au-delà de la décision rendue par le tribunal ?
Quels impacts le démantèlement de Google pourrait-il avoir sur le marché de la recherche en ligne et sur l'industrie dans son ensemble ?
Certains analystes suggèrent que l'administration Trump pourrait être moins catégorique avec Google et les autres Big Tech. Qu'en pensez-vous ?

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