Dans son communiqué de presse, l'UE indique que les modifications apportées au système de vérification bleue de X, qui permet à tout utilisateur de payer pour être « vérifié », empêchent les utilisateurs de déterminer l'authenticité des autres comptes avec lesquels ils interagissent. Il existe également des preuves que des acteurs malveillants abusent du système pour tromper intentionnellement les utilisateurs, selon les conclusions de l'UE.
Exit les certifications gratuites acquises avant l'arrivée d'Elon Musk
Depuis le 1er avril 2023, Elon Musk a mis fin au programme de vérification héritée (la pastille bleue qui était précédemment accordée aux comptes en fonction de l'identité, de la notoriété et d'autres critères), l'objectif étant de pousser les utilisateurs à passer à l'offre payante Twitter Blue. Ceux qui ont obtenu leur badge bleu avant qu'Elon Musk ne devienne le PDG de l'entreprise doivent eux aussi payer pour conserver le badge.
En réalité, cette décision n'est pas vraiment une surprise : avant même d'être PDG de Twitter, Elon Musk s’était montré hostile contre le système d’attribution des badges. Il avait par exemple expliqué en décembre que l’obtention de ces certifications gratuites avait été faite de façon « corrompue ».
Une situation qui ne passe pas sous le prisme de la DSA : les coches bleues de X jugées trompeuses par l’UEOn April 1st, we will begin winding down our legacy verified program and removing legacy verified checkmarks. To keep your blue checkmark on Twitter, individuals can sign up for Twitter Blue here: https://t.co/gzpCcwOpLp
— Verified (@verified) March 23, 2023
Organizations can sign up for https://t.co/RlN5BbuGA3…
X, anciennement connu sous le nom de Twitter, a été désigné comme une très grande plateforme en ligne le 25 avril 2023 en vertu de la loi sur les services numériques de l'UE, suite à sa déclaration d'atteindre plus de 45 millions d'utilisateurs actifs mensuels dans l'UE.
Le 18 décembre 2023, la Commission a ouvert une procédure formelle pour déterminer si X pourrait avoir enfreint la loi sur les services numériques dans des domaines liés à la diffusion de contenus illicites et à l'efficacité des mesures prises pour lutter contre la manipulation de l'information, pour lesquels l'enquête se poursuit, ainsi qu'aux schémas sombres, à la transparence de la publicité et à l'accès aux données pour les chercheurs, qui font l'objet des conclusions préliminaires adoptées aujourd'hui.
L'Union européenne a averti X que son système de vérification par coche bleue violait les règles de la loi sur les services numériques (DSA), estimant qu'il était trompeur pour les utilisateurs et qu'il allait à l'encontre des pratiques établies dans le secteur. À l'issue de son enquête sur la plateforme, l'UE a également constaté que X ne respectait pas ses obligations de transparence en matière de publicité et de fourniture de données publiques aux chercheurs.
C'est la première fois qu'une entreprise est officiellement accusée d'avoir enfreint la DSA au stade des conclusions préliminaires de la procédure d'enquête de l'UE. La société X a maintenant la possibilité de se défendre.
Pour mémoire, avant l’acquisition de X par Elon Musk en 2022, les coches bleues étaient utilisés pour vérifier l’authenticité des comptes sur les réseaux sociaux. Ils étaient considérés comme des sources d’information fiables. Cependant, depuis que n’importe qui peut désormais souscrire à ce statut vérifié moyennant paiement, leur signification a changé. Les utilisateurs ont du mal à distinguer les comptes authentiques des autres. La Commission européenne estime que cette pratique nuit à la capacité des utilisateurs de prendre des décisions éclairées sur l’authenticité des comptes et du contenu qu’ils consultent :
Dans sa déclaration, Margrethe Vestager, responsable de la concurrence à l'UE, a déclaré : « Nous estimons que X ne respecte pas la DSA dans des domaines clés en matière de transparence » :
Si X ne répond pas aux trois griefs de la Commission européenne, l'entreprise pourrait faire l'objet d'une action formelle et se voir infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 6 % de son chiffre d'affaires global. Étant donné que X est une société privée - rachetée par Elon Musk pour 44 milliards de dollars en octobre 2022 - on ne sait pas exactement combien elle risque de perdre en pénalités financières.
La réaction d'Elon MuskBack in the day, #BlueChecks used to mean trustworthy sources of information✔️🐦
— Thierry Breton (@ThierryBreton) July 12, 2024
Now with X, our preliminary view is that:
❌They deceive users
❌They infrige #DSA
X has now the right of defence —but if our view is confirmed we will impose fines & require significant changes. pic.twitter.com/M9tGA5pYQr
Les accusations de la Commission, qui portent également sur le blocage de l'accès aux données pour les chercheurs et sur les lacunes de sa base de données publicitaire, ont suscité une réponse combative de la part de Musk.
« La Commission européenne a proposé à X un accord secret illégal : si nous censurions discrètement des propos sans en parler à personne, elle ne nous infligerait pas d'amende », a-t-il écrit sur le site. « Les autres plateformes ont accepté ce marché. X ne l'a pas fait ». Il n'a pas fourni d'autres détails.
Analyse critique des coches bleues de XThe European Commission offered 𝕏 an illegal secret deal: if we quietly censored speech without telling anyone, they would not fine us.
— Elon Musk (@elonmusk) July 12, 2024
The other platforms accepted that deal.
𝕏 did not. https://t.co/4lKsaRsYoA
La démocratisation de la vérification
L’ouverture des coches bleues aux utilisateurs moyennant un abonnement mensuel a suscité des débats passionnés. D’un côté, certains soutiennent que cela démocratise l’accès à la vérification, permettant à des individus talentueux mais moins célèbres d’obtenir une reconnaissance officielle. D’un autre côté, cela dilue la signification de ces marques de vérification, les rendant moins fiables pour les utilisateurs.
L’impact sur la confiance
La confiance des utilisateurs envers les comptes vérifiés a été ébranlée. Autrefois considérés comme des sources d’information crédibles, les coches bleues sont maintenant perçues comme des badges de statut plutôt que comme une garantie d’authenticité. Cette évolution soulève des questions sur la transparence et la responsabilité de X envers ses utilisateurs.
Les conséquences pour les influenceurs
Les influenceurs et les personnalités publiques se sentent lésés par cette nouvelle politique. Ils estiment que leur statut vérifié perd de sa valeur face à la prolifération des comptes vérifiés. Certains ont même appelé à un retour aux anciennes règles de vérification pour préserver l’intégrité de cette fonctionnalité.
En somme, les coches bleues de X sont au cœur d’un débat complexe entre accessibilité, confiance et équité. L’entreprise devra trouver un équilibre délicat pour satisfaire ses utilisateurs tout en respectant les normes de transparence et d’intégrité.
Conclusion
La répression contre X intervient alors que l'UE renforce l'application de ses règles strictes à l'égard des grandes entreprises technologiques. Des enquêtes distinctes concernant la DSA ont été lancées pour déterminer si Meta a pris des mesures suffisantes pour modérer les contenus politiques, trompeurs ou illégaux sur Facebook et Instagram, ou pour protéger les enfants qui utilisent ces plateformes.
Sources : Commission européenne (1, 2)
Et vous ?
Pensez-vous que les pastilles bleues devraient être réservées aux personnalités influentes ou accessibles à tous ? Pourquoi ?
Comment percevez-vous l’authenticité des comptes vérifiés sur les réseaux sociaux depuis que n’importe qui peut les obtenir en payant ?
Croyez-vous que les utilisateurs sont conscients du changement de signification des pastilles bleues ?
Quelles mesures pensez-vous que X pourrait prendre pour améliorer la transparence autour de cette fonctionnalité ?
L’UE a-t-elle raison de qualifier cette pratique de “dark pattern” ? Pourquoi ou pourquoi pas ?