L'État irlandais a récemment fait part de son projet de mettre en place un registre des préférences en matière de pornographie pour la majeure partie de l'Union européenne. Cette initiative, présentée par Jeremy Godfrey, président exécutif de la nouvelle autorité irlandaise de régulation du contenu Internet, vise à instaurer un code de conduite régissant l'accès des adultes aux sites Internet, avec des implications aussi surprenantes que controversées. Les groupes de défense de la sécurité des enfants réclament depuis longtemps une vérification de l'âge sur les sites pornographiques, car ils craignent qu'il soit trop facile pour les mineurs d'accéder à des contenus réservés aux adultes.
Cette semaine, le président exécutif de la nouvelle autorité irlandaise de régulation du contenu Internet, Jeremy Godfrey, s'est prêté au jeu des commentaires de la presse pour discuter du projet de Coimisiún na Meán (Commission des médias) d'introduire un code de conduite pour contrôler la manière dont les adultes accèdent aux sites Internet.
Créée en mars 2023 en vertu de la loi de 2022 sur la sécurité en ligne et la réglementation des médias, Coimisiún na Meán est la nouvelle commission irlandaise chargée de la régulation des diffuseurs, des services à la demande et des médias en ligne. Son mandat, succédant à celui de son prédécesseur, la Broadcasting Authority of Ireland, consiste à soutenir le développement des médias et à garantir un paysage médiatique florissant et varié en Irlande. L'objectif principal de cette commission est de favoriser une diversité de voix, d'opinions et de sources d'information et d'actualités, tout en veillant à maintenir un environnement en ligne sécurisé.
Nouvelle approche pour protéger les mineurs des contenus adultes en ligne
Jeremy Godfrey a exposé au Irish Examiner le plan présenté à la page 17 du document de consultation et de proposition de la commission. Cet organisme réglemente le contenu (et en particulier le contenu vidéo) pour les plus grandes sociétés Internet du monde, du fait que nombre d'entre elles sont basées en Irlande. Jeremy Godfrey a déclaré que le nouveau code de sécurité en ligne visait à protéger les enfants de ce qui pourrait nuire à leur développement physique et mental.
Dans le cadre des efforts déployés pour protéger les enfants contre les contenus préjudiciables en ligne, il pourrait bientôt être demandé aux internautes de télécharger les détails de leur passeport ou un selfie sur les sites web s'ils souhaitent visionner des contenus pour adultes. Le nouveau régulateur des médias a déclaré qu'une partie du nouveau code de sécurité en ligne indiquera aux plateformes numériques qu'elles doivent utiliser une forme efficace de vérification de l'âge pour visionner des visionner des contenus pour adultes sur le web. « Se contenter de demander à quelqu'un s'il a plus de 18 ans n'est pas efficace », a déclaré Jeremy Godfrey, président exécutif de Coimisiún na Meán. « Il faut faire plus que cela avant qu'ils ne voient ce type de contenu. »
Bien que Godfrey ait déclaré que son bureau ne serait pas « absolument prescriptif » sur la manière dont la vérification de l'âge devrait fonctionner, l'obligation pour une personne de présenter son passeport puis un selfie pour vérifier qu'elle est bien la personne figurant sur le passeport pourrait être décrite comme un « étalon-or » de la vérification de l'âge d'une personne.
« Nous nous soucions beaucoup plus de l'efficacité que de la manière dont elle est obtenue », a-t-il déclaré. « Il y a d'autres moyens que l'on pourrait envisager, comme une selfie en direct à chaque fois que l'on veut accéder au passeport et que l'on utilise la biométrie pour vérifier. « C'est moins précis. Il peut être difficile de distinguer un jeune de 17 ou 18 ans de cette manière. Mais cela protégera les enfants plus jeunes ».
Code de sécurité en ligne
Le code de sécurité en ligne fera l’objet d'une consultation publique jusqu'à la fin du mois. Il décrit les mesures que les plateformes de partage de vidéos devront mettre en œuvre pour protéger les utilisateurs, en particulier les enfants, des contenus préjudiciables en ligne. Le cadre comprendra également la loi européenne sur les services numériques et le règlement européen sur le contenu terroriste en ligne. Une fois établi, le nouveau code sera juridiquement contraignant et les plateformes s'exposeront à des amendes pouvant aller jusqu'à 20 millions d'euros en cas d'infraction.
En 2022, le gouvernement britannique a annoncé que les sites web diffusant de la pornographie seront légalement tenus de vérifier l'âge de leurs utilisateurs, conformément aux nouvelles règles de sécurité en ligne. Chris Philp, alors ministre du Numérique, soulignait alors la facilité d'accès des enfants à la pornographie en ligne, insistant sur la nécessité d'assurer aux parents que leurs enfants sont protégés contre les contenus inappropriés. Cette mesure, intégrée au projet de loi sur la sécurité en ligne, vise à améliorer la protection des enfants contre les contenus explicites, bien que des propositions similaires aient été abandonnées en 2019.
À la fin de l'année précédente, l'Office britannique des communications (Ofcom) a suggéré l'intégration de scanners faciaux basés sur l'intelligence artificielle pour évaluer l'âge des utilisateurs accédant à des contenus pour adultes en ligne. Cette proposition fait partie de son plan visant à mettre en place une barrière d'âge sur Internet d'ici 2025.
Parallèlement, en France, la CNIL envisage de déployer une stratégie de vérification de l'âge pour prévenir l'accès des mineurs aux sites pornographiques. La présidente de l'organisme, Marie-Laure Denis, adopte une approche pragmatique dans cette démarche. Lors d'une interview au Figaro, elle évoque différents dispositifs possibles pour vérifier l'âge des visiteurs, y compris un contrôle via la carte bancaire, que les sites concernés refusent souvent. Elle n'exclut pas non plus l'utilisation d'un système d'analyse faciale.
En 2018, Marlène Schiappa, alors secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, annonçait l'objectif de rendre les contenus pornographiques inaccessibles aux enfants. Elle exprimait son intention, lors d'une déclaration sur Franceinfo, d'obliger les fournisseurs de contenus pornographiques à mettre en place des filtres pour empêcher l'accès aux enfants, ou du moins pour le rendre plus difficile. Marlène Schiappa affirmait que des mesures rigoureuses seraient prises en collaboration avec d'autres ministres concernés, tels que Jean-Michel Blanquer, Mounir Mahjoubi et Agnès Buzyn.
les enjeux de la nouvelle régulation sur les contenus adultes et le code de sécurité
En vertu du code de sécurité en ligne, l'organisme irlandais Coimisiún na Meán sera chargé de faire appliquer ces mesures à toutes les plateformes de partage de vidéos dont le siège européen se trouve en Irlande. Cela inclut certains des principaux géants de la technologie. Une liste complète des sites concernés devrait être publiée par l'autorité de régulation au cours de la semaine prochaine.
Godfrey a déclaré qu'il s'agissait de protéger les enfants de ce qui pourrait nuire à leur développement physique et mental. « Nous disons aux plateformes qu'elles doivent l'interdire dans leurs conditions générales. Et vous devez appliquer ces conditions avec diligence et disposer de mécanismes de signalement pour les identifier ».
Dans une session de questions-réponses diffusée en ligne concernant le code, Coimisiún na Meán a examiné la possibilité que les enfants puissent facilement contourner les procédures de vérification d'âge pour accéder à des contenus destinés aux adultes. Il a déclaré : « Dans le cas des services pornographiques, des mesures robustes de vérification de l'âge doivent être utilisées. La forme de vérification de l'âge est laissée à la plateforme et c'est à la plateforme de s'assurer qu'elle respecte toutes les obligations du RGPD et de la protection de la vie privée à cet égard.
L'autorité de régulation a déclaré que l'auto-déclaration et l'estimation basée sur la manière dont une personne utilise un service « ne seront probablement pas suffisantes pour restreindre l'accès à la pornographie et aux contenus extrêmement violents », mais qu'elles pourraient être suffisantes pour empêcher les utilisateurs mineurs. Les plateformes en ligne devront également déterminer le degré de précision de leur méthode, car aucune technique de vérification de l'âge n'est efficace à 100 %. Elles seront tenues d'effectuer des mesures et de faire rapport à l'autorité de régulation à ce sujet.
« Il faut disposer d'un mécanisme de vérification de la qualité, pour que ce soit transparent, a déclaré Godfrey. Une plateforme peut réagir de différentes manières. Peut-être qu'elle ne montrera des contenus pornographiques qu'aux utilisateurs qui ont choisi de le faire. Mais nous leur demanderons d'être efficaces et de prouver qu'elles le sont. »
Comme dit précédemment, les utilisateurs, qu'ils soient adultes ou mineurs, seraient tenus de fournir une copie de leur passeport et un selfie en direct aux sites web, y compris ceux à caractère pornographique. Ces sites effectueraient ensuite un traitement biométrique des données faciales pour confirmer l'âge des utilisateurs. Cette proposition ne se limite pas aux sites pornographiques, mais pourrait également s'étendre à toute plateforme de partage vidéo relevant de la juridiction irlandaise, incluant des géants comme Facebook, WhatsApp, X (Twitter) et YouTube. Les restrictions pourraient également englober tout contenu jugé « inapproprié à l'âge », créant ainsi un cadre réglementaire bien au-delà des exigences de la directive européenne sur l'audiovisuel.
Des préoccupations sur la vie privée et les libertés individuelles dans la régulation des sites pornographiques
L'introduction d'un code de conduite par l'Irlande pour contrôler l'accès des adultes et des mineurs aux sites Internet pornographiques soulève des préoccupations quant à la protection de la vie privée et des libertés individuelles. Les exigences de vérification d'âge, impliquant l'envoi de copies de passeports et de selfies en direct, suscitent des inquiétudes quant à la proportionnalité de ces mesures.
Collecte de données biométriques sensibles : l'exigence de fournir des selfies en direct pour la vérification d'âge soulève des préoccupations majeures quant à la collecte de données biométriques sensibles. La transmission d'images du visage des utilisateurs aux sites Internet, notamment ceux à caractère pornographique, peut compromettre la vie privée des individus en exposant des détails intimes de leur apparence physique.
Stockage et traitement des informations personnelles : les mesures proposées impliquent l'envoi de copies de passeports, ce qui soulève des inquiétudes quant au stockage et au traitement de données personnelles hautement sensibles. Le risque de fuites de données ou d'utilisation abusive de ces informations compromet la confidentialité des individus et soulève des questions sur la sécurité des données conformément aux normes du règlement général sur la protection des données (GDPR).
Critiqué pour son manque d'expérience et de compréhension du média Internet, le nouveau régulateur, Coimisiún na Meán, soulève des préoccupations majeures quant à la proportionnalité et à la nécessité de cette initiative, mettant en avant des risques de sécurité liés à la transmission de documents sensibles et au traitement biométrique des données. Cette annonce suscite un débat intense sur la légitimité et l'efficacité d'une telle régulation, remettant en question la capacité de l'État irlandais à jouer un rôle de premier plan dans la régulation d'Internet.
Source : Commission des médias irlandais
Et vous ?
Quel est votre avis sur le sujet ?
Pensez-vous que l'initiative de l'État irlandais sera efficace, ou estimez-vous qu'elle est condamnée à l'échec ?
Quelles mesures seront prises pour garantir que la proposition n'entrave pas injustement l'accès légitime aux contenus pour adultes par des adultes responsables ?
Voir aussi :
Les sites pornographiques britanniques seront légalement tenus de vérifier l'âge de leurs utilisateurs, en vertu des nouvelles lois sur la sécurité sur Internet
Les scanners de visage par IA, non éprouvés, pourraient permettre d'estimer l'âge d'accès à la pornographie au Royaume-Uni, des doutes persistent quant à leur efficacité
Porno : la Cnil n'est pas fermée à l'utilisation de la reconnaissance faciale pour vérifier l'âge des internautes, le gouvernement va lancer un premier test du système du double anonymat en mars
Protection des enfants des sites pornographiques : l'Irlande envisage une validation d'âge rigoureuse sur Internet
Et propose un code de sécurité en ligne
Protection des enfants des sites pornographiques : l'Irlande envisage une validation d'âge rigoureuse sur Internet
Et propose un code de sécurité en ligne
Le , par Bruno
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !