Les sénateurs votent majoritairement contre l'amendement n°134
Adoptée en première lecture avec modifications par l'Assemblée nationale le 24 novembre 2020, puis par le Sénat ce 18 mars, la loi a été déposée par le 20 octobre 2020 par les députés Jean-Michel Fauvergue et Alice Thourot et plusieurs de leurs collègues. La loi encadre la façon dont la vidéoprotection, les caméras piétons et les drones pourront être utilisés par les forces de l'ordre et les services de sécurité. Bien qu'elle ait fait l'objet de modifications avant son adoption, l'amendement numéro134 demandant d'interdiction de la reconnaissance faciale via les caméras embarquées n'a pas été voté.
« Le traitement des images par des logiciels de reconnaissance faciale est interdit », indique l'amendement. « Il s'agit par cet amendement d'exclure explicitement le traitement des images issues des caméras embarquées par des logiciels de reconnaissance faciale, ces derniers faisant craindre des risques de surveillance de masse de la population », ont expliqué les sénateurs à l'origine de l'amendement. Selon eux, les craintes et les débats suscités par la technologie de la reconnaissance faciale ne font que grandir. Ils illustrent cela par le fait que la Commission européenne souhaite interdire temporairement la technologie.
En effet, dans un livre blanc publié en janvier 2020, la Commission européenne envisageait une interdiction temporaire des technologies de reconnaissance faciale dans divers secteurs. Ces derniers estiment également que la reconnaissance faciale ne doit pas être considérée comme une technologie d'identification biométrique comme les autres. En outre, ils mettent en avant les dispositions prévues par le RGPD en la matière. « Le RGPD garantit aux citoyen.ne.s européen.ne.s le droit de ne pas faire l'objet d'une décision fondée exclusivement sur un traitement automatisé, y compris le profilage », rappellent les sénateurs.
« L’usage de la reconnaissance faciale, notamment de façon automatisée, entre en contradiction avec l’article 5 du RPGD (principes de licéité, loyauté, transparence). Parce que la reconnaissance faciale appartient à la catégorie plus large des techniques biométriques, elle entre également en contradiction avec l’article 9 interdisant le traitement des données biométriques aux fins d’identifier une personne physique de manière unique », ont-ils ajouté. Toutefois, en dépit de leurs arguments, ils ont vu leur amendement rejeté. Au total, 248 sénateurs ont voté contre et seulement 98 ont voté pour. Voici quelques détails sur la loi qui a été adoptée.
Les caméras embarquées
La loi a subi un amendement de la part du gouvernement pour créer un régime juridique afin d'autoriser les forces de l’ordre et les services de sécurité civile à disposer de caméras embarquées dans leurs véhicules. Lors de la lecture au Sénat, cette possibilité a été étendue aux policiers municipaux. Il s’agit notamment de faciliter le constat des infractions (agressions, rodéos urbains…). Le public sera informé par "une signalétique spécifique".
Les drones
Selon la proposition de loi, l'usage des drones par les forces de l’ordre manquait d'un cadre clair. Mais l’article 22 de la proposition de loi définit désormais un régime juridique quant à cela. Les cas d'utilisation des drones par les forces de l'ordre et des services publics ont été limités par le Sénat. À l'avenir, leur usage est justifié dans les conditions suivantes : sécurisation de rassemblements en cas de "troubles à l’ordre public d’une particulière gravité", surveillance de sites exposés, des frontières, secours aux personnes… Outre les forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers et les personnels de la sécurité civile pourront en faire usage.
Cela dit, des garanties ont été posées. Le Sénat demande d'informer le public en amont et interdit le recours permanent aux drones. Il est également interdit de filmer l’intérieur des domiciles et les entrées. De même, le Sénat indique que l'usage de drones pour des opérations de police nécessite une autorisation préalable du préfet ou du procureur de la République. D'autre part, le ministère de l'Intérieur devra élaborer, puis actualiser régulièrement, des lignes directrices sur l'emploi des drones (une sorte de doctrine d'emploi), sous le contrôle de la CNIL.
La vidéoprotection
La proposition de loi adoptée hier augmente le nombre de services pouvant visionner les images de vidéoprotection. Le Sénat indique que les polices municipales pourront visionner les images tirées des caméras aux abords des commerces. En outre, il a introduit plusieurs garanties techniques sur ce point et prévu un avis de la Commission nationale de la vidéoprotection sur le projet de décret qui viendra fixer les modalités du dispositif.
Ensuite, certains agents de la RATP et de la SNCF auront accès à la vidéoprotection de la voie publique sous la responsabilité de l’État. Le Sénat indique que cela entre dans le cadre de la sécurisation des transports publics. Le dispositif de vidéosurveillance des personnes gardées à vue ou retenues dans un centre de rétention administrative est désormais encadré par un nouvel article introduit par le Sénat lors de la lecture jeudi.
Les caméras piétons
Les sénateurs ont modifié les règles encadrant l’usage par les policiers et gendarmes des caméras piétons. Selon le Sénat, la nouvelle réglementation devra être généralisée d'ici juillet 2021. « Les images pourront être transmises en direct au poste de commandement si la sécurité des agents ou des biens et des personnes est menacée. Les policiers nationaux et municipaux et les gendarmes sur le terrain pourront accéder directement à leurs enregistrements dans des limites précisées par le Sénat sur recommandations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) », prévoit la loi.
Sources : Sénat, Loi sur la sécurité globale, L'amendement n°134
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