Google a déposé un recours devant le Tribunal de l'Union européenne à Bruxelles mardi pour contester une amende de 1,7 milliard de dollars infligée par l’institution européenne pour ce qu’elle a qualifié de comportement anticoncurrentiel dans l'industrie de la publicité en ligne, selon CNBC. Ce qui constitue la troisième amende antitrust contre le géant de la Silicon Valley en Europe a été rendu officiel en mars dernier par la Commission européenne, et concerne cette fois un abus de position dominante sur le marché de la publicité en ligne par le biais de son activité AdSense. Selon l'UE, la pratique publicitaire de Google de restreindre les annonces de recherche des concurrents en ligne était « illégale » en vertu des règles antitrust de l'Union.
Adsense offrait aux entreprises une boîte de recherche dans laquelle les visiteurs du site Web de l'entreprise pouvaient naviguer facilement dans son contenu. Et en échange, les publicités de Google apparaîtraient dans les résultats. Jusqu'en 2016, date à laquelle l'Europe a ouvert son enquête, Google a empêché les hôtes de diffuser les annonces de leurs concurrents.
A partir de 2006, la firme imposait des règles strictes aux éditeurs. En effet, pour qu'un webmaster devienne partenaire de la régie publicitaire de Google et génère des revenus publicitaires pour son propre compte, il doit publier du contenu sur son propre site et y faire figurer le code Adsense fourni par Google. Google avait même interdit aux éditeurs de placer des moteurs de recherche concurrents sur leurs sites web. Pire encore, les éditeurs devaient adresser une demande d’autorisation écrite à Google avant tout changement concernant l’affichage de publicités rivales.
En 2009, Google a légèrement modifié cette règle en permettant d’inclure un moteur de recherche concurrent à condition que son moteur soit plus mis en avant, de sorte à contrôler les meilleurs emplacements pour la publicité. Et 2016, Google a complètement retiré ces conditions. C’est en ce moment que l’UE a commencé à enquêter sur les pratiques anticoncurrentielles de Google. La régie publicitaire est accusée d’abus de position dominante dans le marché très lucratif de la publicité en ligne en Europe où AdSense détient 80 % des parts de l’intermédiation publicitaire.
« Google a consolidé sa position dominante dans les annonces de recherche en ligne et s'est protégé de la pression concurrentielle en imposant des restrictions contractuelles anticoncurrentielles aux sites Web tiers. C'est illégal en vertu des règles antitrust de l'UE. L'inconduite a duré plus de dix ans et a privé d'autres entreprises de la possibilité de rivaliser sur le fond et d'innover - et les consommateurs des avantages de la concurrence » a dit la commissaire européenne en mars lorsqu’elle a annoncé la sanction.
Mais le géant de la recherche a rejeté le mardi dernier l'accusation antitrust concernant sa régie publicitaire, et devrait être confronté aux régulateurs européens à Bruxelles dans les mois à venir, pour réfuter cette décision. Google a confirmé mercredi qu’il a fait appel de l’amende de l’UE, dans un courriel adressé à CNBC. « La Commission défendra sa décision devant la Cour », a également déclaré un porte-parole de la Commission européenne à CNBC.
Ce n’est pas première sanction que la Commissaire européenne inflige à Google. La commissaire européenne sortante Margrethe Vestager, qui devrait se présenter à la présidence de l’Union, et qui est maintenant connue pour son intransigeance envers les plateformes numériques en Europe, en a imposées déjà deux premières.
L’année dernière, l’UE a infligé une amende record de 4,3 milliards d’euros à Google en raison de l’exploitation d’Android pour conforter sa domination du marché de la recherche au détriment de la concurrence. Mme Vestager a été en grande partie l’artisane de cette amende infligée à l'entreprise en juillet pour avoir conclu des accords avec des fabricants comme Apple, Huawei et Samsung afin de s'assurer que ses propres applications avaient la mainmise sur le système d'exploitation Android.
Une année auparavant, Google a été contraint par le régulateur antitrust du l’UE de verser 2,4 milliards d’euros pour avoir désavantagé ses concurrents. La Commission européenne avait à cette époque jugé que le moteur de recherche de Google abusait de son rôle d'agrégateur en faisant la promotion de ses propres publicités sur son service de shopping.
Les efforts de Google pour éviter une troisième sanction de l'UE
Google a commencé depuis lors à faire des améliorations dans ses services en Europe. Il a supprimé la clause qui empêchait les hôtes de diffuser les annonces concurrentes et offre maintenant une réduction des recettes publicitaires. Un nouveau format pour les publicités de shopping enverra dorénavant plus de trafic à ses concurrents et la promotion de liens vers des sites de comparaison, d’après le Télégraph. Mme Vestager a même noté que les sanctions de l’UE à l’encontre de Google ont poussé l’entreprise à réagir.
Les internautes européens auront bientôt le choix entre différents navigateurs pour aller sur le Web à partir de leur téléphone, car Google leur en donnera la possibilité. Auparavant, Chrome, un navigateur Web appartenant à Google, apparaissait par défaut. Aussi, les fabricants de téléphones ne seront plus obligés d'installer Google Search et Google Chrome dans le cadre d'un contrat de licence qui permet à l'app store Android, Google Play, d'apparaître sur le téléphone lors de l'achat, selon le Telegraph.
Mais ses efforts n’ont pas empêché l’UE d’infliger cette troisième amende, qui, si elle reste intacte après la confrontation en appel, complètera la facture totale antitrust de Google à 8,2 milliards d'euros. La troisième facture pourrait même être plus salée. Google risquait de faire l’objet d’une amende allant jusqu’à 13 milliards de dollars conformément aux règles de la concurrence européenne, soit 10 % du dernier chiffre d'affaires mondial de l'entreprise qui s'élevait pour Alphabet, maison mère de Google, à un montant de 136,8 milliards de dollars, en hausse de 23 % sur un an.
Dans la même semaine où l’amende a été prononcée Kent Walker, le conseiller juridique de Google, publié un article de blog dans lequel il disait :
« L'une des principales caractéristiques des marchés ouverts et concurrentiels et des produits Google est le changement constant.
« Chaque année, nous apportons des milliers de changements à nos produits, encouragés par les commentaires de nos partenaires et de nos utilisateurs. Au cours des dernières années, nous avons également apporté des changements à Google Shopping, à nos licences d'applications mobiles et à AdSense for Search en réponse directe aux préoccupations officielles soulevées par la Commission européenne.
« Depuis lors, nous écoutons attentivement les réactions que nous recevons, tant de la Commission européenne que d'autres organisations. Par conséquent, au cours des prochains mois, nous ferons d'autres mises à jour de nos produits en Europe ». Mais ce message n’a rien changé à la décision de l’UE.
La bataille juridique qui s'annonce survient alors que Google fait face à un examen antitrust accru aux États-Unis, le ministère de la Justice se préparant à enquêter sur l'entreprise et un groupe bipartisan au Congrès préparant un examen approfondi des pratiques des entreprises technologiques. Selon Reuters, des responsables de la division antitrust du ministère de la Justice et de la Commission fédérale du commerce (FTC), qui appliquent tous deux la loi antitrust, se sont réunis ces dernières semaines pour discuter du cas de Google. Ils veulent enquêter sur Google afin de déterminer si le géant de la technologie a enfreint la loi antitrust en exploitant ses vastes activités en ligne.
Les régulateurs américains ne manqueront certainement aucun épisode de la prochaine confrontation entre Google et les régulateurs européens pour se faire une idée de leur future investigation. Pour l’heure, Google devrait lutter du côté de Bruxelles pour diminuer ou annuler sa dernière facture.
Source : CNBC
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Concernant des pratiques publicitaires « illégales »
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Le , par Stan Adkens
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